Fin du voyage |
Le 2 aout, nous retournons à Kulusuk pour prendre notre avion pour l'Islande et nous envoler vers de nouvelles aventures
Au moment où nous préparions ce voyage, il n'y avait pas beaucoup d'informations sur l'Est Groenland, donc on pose ici notre "bilan", qui pourrait servir à d'autres.
La navigation vers l'Est Groenland ne s'improvise pas. L'accès à la cote est difficile à cause de la glace et la météo souvent extrême entre l'Islande et le Groenland (passage fréquent de dépressions en dessous de l'anticyclone du Groenland). Une fois sur place, l'isolement et le manque d'infrastructure (hôpital, secours) peut rendre tout problème très critique. L'ouest du Groenland est mieux équipé, et l'archipel de Svalbard bien mieux équipé par exemple, car moins vaste.
Cela étant dit, l'Est Groenland est inoubliable, et aujourd'hui, on rêve d'y retourner. Les paysages sont à couper le souffle, et on est en fusion avec une nature sauvage. Une Norvège sous stéroïdes en somme. Une différence de taille est qu'un anticyclone se trouve souvent coincé sur le Groenland, donnant du meilleur temps qu'en Norvège (une fois sur place..).
Les fonds sont généralement de bonne tenue, souvent des sédiments charriés par les rivières et glaciers. En revanche, la bathymétrie est inconnue et parfois surprenante.
On peut prévoir de rester dans le coin du Sermilik et d'Angmasalik pendant plusieurs semaines, tant il y a de belles montagnes à explorer. Prévoir le matériel d'alpinisme (et de bivouac si l'équipage peut se scinder!). Les distances à parcourir en mer sont raisonnables (quelques dizaines de milles entre les points interessants). Le voilier donne une liberté incomparable, car on accède à tout par la mer, Bien mieux que les services de transport/aventure pour touristes qui sont efficaces, mais peu nombreux et très chers.
Il faut prévoir de toucher du cailloux ou de la glace, car les fonds sont très mal cartographiés, et les conditions de glace très changeantes. Le dériveur alu nous parait toujours le choix le plus rassurant
(résistance au poinçonnement et ductilité de la coque). Après, on a croisé des quillards en bois ou plastique. Et on voit que les coques modernes en plastique tiennent apparemment bien le coup sur les cailloux. Mais bon, sachant qu'on est loin de tout...
Concernant l'équipage, le mieux est d'être au moins trois personnes à bord. On a croisé quelques solitaires qui ont été faire un tour au Groenland Est, mais ils n'y restent généralement pas longtemps car c'est épuisant. Quand la navigation se complique, il faut être à la barre, à la carte/radar, dans le mat, et sur le pont pour pousser les glaçons...donc mieux vaut être >3, et être connectés par radio pour éviter de crier (pas efficace quand il y a du vent, fatiguant, et stressant).
Concernant l'équipement, quelques autres points que l'on a noté:
- les échelons de mat sont très pratiques, car permettent de monter et descendre rapidement et en quasi-autonomie (reste l'assurage par des drisses qu'il faut sous-traiter),
- radar indispensable, surtout au large car la présence combinée d'icebergs et de brouillard est fréquente.
- une bonne autonomie en eau douce (ou dessalinisateur) mais surtout en gasoil est nécessaire. En effet, les points de remplissages ne sont pas légions au Groenland Est, les pontons et accès ne sont pas toujours adaptés au voiliers, et surtout, on n'est jamais à l'abri d'un carburant de mauvaise qualité. Donc moins on remplit, mieux c'est. Surtout qu'à cause de l'anticyclone et la glace, il ne faut pas avoir trop l'ambition de progresser à la voile dans les fjords
- Tenues de guerre contre le froid: sous-vêtements en laine, duvet, et coupe vents étanches par dessus. Gants et bonnets chauds et étanches. Crocs+chaussettes étanches de cycliste quand temps sec, ou bottes fourrées de pêcheur sinon. Combi de survie pour tout le monde au cas où.
- Connexion satellite (Iridium) pour recevoir du guidage dans les glaces. Généralement le débit est trop faible pour télécharger les cartes des glaces, alors il faut quelqu'un de confiance à terre qui peut nous router.
- Fusées stylo rechargeables avec projectiles pour effrayer les ours. Et fusil puissant (calibre .308 par ex) à conserver absolument dans une housse pour éviter la corrosion. On rappelle que l'utilisation du fusil est a pour but de tuer l'animal en cas de danger imminent, quand tout le reste (planification, repli, intimidation) a échoué.
- Il faut supposer qu'on ne pourra pas recevoir d'aide, donc prévoir une autonomie en réparations, pharmacie, etc...
Le bouquin High lattitude sailing par Jon Amtrup et Bob Shepton est une bonne référence.
À bientôt pour de nouvelles aventures!
Bye bye Kulusuk |
Le Nord de Kulusuk vu d'avion |
Le sud de Kulusuk (atterissage depuis le large) vu d'avion |